03-10-2011

PL consommateurs : article 7 (extension des IGP / coutellerie)

Deuxième séance du vendredi 30 septembre 2011

M. le président. La séance est ouverte.

Protection des consommateurs

Suite de la discussion d’un projet de loi

(…)

Article 7

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer, première inscrite sur l’article.

Mme Valérie Boyer. Je remercie d’abord le Gouvernement et la commission des affaires économiques de nous permettre d’évoquer ces sujets.

L’article 7 porte sur les labels, et propose notamment la création d’appellations liées à des origines géographiques.

J’ai moi-même, à plusieurs reprises, posé des questions au Gouvernement à propos de produits non alimentaires qui méritent une appellation protégée – en tant que Marseillaise, j’ai pensé au savon de Marseille, mais on peut aussi penser à la porcelaine de Limoges ou aux couteaux Laguiole, sans doute chers à notre président de séance. Aujourd’hui, ces produits sont connus dans le monde entier, mais leurs fabricants sont spoliés – et le mot est faible. Nous devons absolument les protéger, et conserver ainsi nos productions et nos savoir-faire.

Nous évoquerons ensuite quelques problèmes qui se posent pour les produits alimentaires. Les amendements que nous allons examiner ont pour objet la protection des consommateurs ; ce ne sont en aucun cas des allégations, mais des informations sur de bonnes pratiques.

Notre devoir est en effet, là aussi, de protéger les consommateurs. La santé publique a été évoquée tout à l’heure à propos du matériel optique. Pourquoi traiter de problèmes de santé publique dans un texte sur la consommation ? Eh bien, parce que dans les siècles passés, mes chers collègues, nous avons fait beaucoup plus de progrès en matière de santé en aménageant les villes, en amenant l’eau potable et en installant des réseaux d’égouts qu’en construisant des hôpitaux ou même en profitant des progrès de la médecine.

Nous vivons dans une société très évoluée. Dans le passé, certains de nos concitoyens souffraient de carences alimentaires ; ensuite, nous avons rencontré des problèmes de sécurité sanitaire ; aujourd’hui, ce que nous devons rechercher, c’est l’équilibre nutritionnel.

C’est une nécessité pour des raisons de santé publique, mais aussi pour des raisons économiques : les problèmes de santé liés à l’alimentation coûtent extrêmement cher, sur le plan humain bien sûr, mais aussi sur le plan financier. Le déficit de la sécurité sociale le montre assez.

Je rappellerai que l’obésité – fortement, quoique pas seulement, liée à la malbouffe – est un facteur aggravant de toutes les maladies mortelles, et dans de très fortes proportions. De même, le surpoids est un facteur aggravant de nombreuses maladies, y compris celles de la sénilité.

Aujourd’hui, il est de notre devoir moral et de notre devoir économique de protéger le consommateur en lui donnant des informations. Or, puisque nous avons choisi de vivre dans une société où la santé constitue une fonction régalienne – et personne dans cet hémicycle ne contestera ce choix –, ces informations doivent venir du Gouvernement.

Je défendrai donc plusieurs amendements qui iront dans ce sens.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Nous abordons ici un beau sujet, une mesure attendue depuis longtemps dans notre pays par des artisans, par des industriels, par les consommateurs – par tous ceux qui sont attachés à notre patrimoine industriel, qui est aussi un patrimoine culturel.

Cette volonté de valoriser l’origine des produits non alimentaires par l’attribution d’une dénomination liée à l’origine géographique permettra indiscutablement, M. le secrétaire d’État et M. le rapporteur l’ont dit maintes fois, de renforcer l’industrie et l’artisanat de nos régions.

Certes, la protection des appellations d’origine demande une approche réfléchie évitant certains clichés que l’on rencontre trop souvent : j’aurai l’occasion d’y revenir en détail. Pour reprendre une expression que les anciens de cette assemblée aiment à citer, je dirai que, dans ce domaine, il faut légiférer d’une main tremblante. Ce doit être notre règle, bien sûr, mais il faut l’appliquer plus strictement encore s’agissant d’un article qui peut présenter des risques pour la production s’il est mal rédigé.

Monsieur le secrétaire d’État, je veux saluer votre méthode parce qu’un travail préparatoire a été effectué. Vous avez reçu, avec votre cabinet, des représentants du milieu économique qui ont pu mettre en évidence les risques que comporte la rédaction actuelle. Je sais que vous avez été à leur écoute et que le rapporteur a pris en compte certains des amendements que j’ai déposés et qui sont l’émanation d’inquiétudes locales.

Quel est le droit en vigueur ?.

Le droit international reconnaît les indications géographiques comme une forme de propriété intellectuelle, au même titre que les marques commerciales. Il s’agit de l’article 22 de l’accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce. Cet article précise qu’ « on entend par indications géographiques des indications qui servent à identifier un produit comme étant originaire du territoire d’un Membre ou d’une région ou localité de ce territoire, dans les cas où une qualité, réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique ».

Le système européen de protection des indications géographiques, mis en place en 1992, est plus contraignant. Il comprend deux types d’indication géographique : les AOP, appellations d’origine protégée, dont le lien avec le territoire est très fort, et les IGP, indications géographiques protégées, dont le lien avec le territoire est plus lâche.

Je rappelle également que l’article 36 du traité instituant la Communauté européenne autorise les États membres à mettre en place une protection nationale pour les dénominations justifiées par la protection de la propriété commerciale. Toutefois, ces interdictions ou restrictions ne doivent constituer – et je m’adresse plus particulièrement à Mme Boyer – ni « un moyen de discrimination », ni « une restriction déguisée dans le commerce ». Je crois que cet élément doit peser dans la suite de nos débats si nous voulons bien prendre en compte la réalité des productions locales.

L’attribution d’une dénomination repose non seulement sur le lien avec l’origine, mais également sur des critères qualitatifs qui figurent dans un cahier des charges contrôlé par un organisme indépendant. Dans les différents alinéas de cet article 36, on retrouve effectivement le cahier des charges, un dispositif qui permet de bien encadrer l’attribution d’une indication géographique protégée.

En ce qui me concerne, je souhaite appeler votre attention sur deux points qui apparaissent dans le règlement du Conseil du 20 mars 2006. Il s’agit de l’article 14, auquel je reviendrai, si nécessaire, au cours du débat. Certes, cet article vise les produits alimentaires, mais on peut le prendre en compte puisque nous nous proposons d’étendre la protection des produits alimentaires aux produits non alimentaires, et tout particulièrement aux produits manufacturés.

Le premier point concerne la dénomination antérieure, c’est-à-dire la prise en compte de la préexistence de dénominations qui sont une réalité avant même l’enregistrement dans la dénomination d’indication géographiquement protégée. L’article 14 est extrêmement clair à cet égard puisqu’il dispose : « Dans le respect du droit communautaire, l’usage d’une marque […] acquise par l’usage de bonne foi sur le territoire communautaire [ … ] avant la date de protection de l’appellation d’origine ou de l’indication géographique dans le pays d’origine, peut se poursuivre nonobstant l’enregistrement d’une appellation d’origine ou d’une indication géographique ».

Je veux insister sur la dénomination antérieure en m’appuyant sur un exemple précis qui n’est connu ni du grand public ni très certainement de nombreux députés. L’appellation « laguiole », qui est très ancienne, et qui pour l’essentiel compte de nombreux noms de couteaux, s’est développée dans la ville de Thiers avant même de trouver un point d’accroche au village de Laguiole. Il existe actuellement cent soixante marques « laguiole », dont certaines remontent au xixe siècle. Quatre cents salariés du bassin coutelier de Thiers travaillent pour le laguiole. C’est un produit fabriqué à 80 % à Thiers. C’est dire l’inquiétude des artisans et des PME et le risque que représenterait pour eux la limitation de cette marque à la localisation géographique du village de Laguiole. Ce serait un coup terrible porté à la coutellerie thiernoise : une concurrence déloyale s’instaurerait en contradiction avec le droit communautaire, voire avec le droit international.

Le second point a trait à la dénomination générique. Des appellations de produits non alimentaires sont devenues des noms génériques. J’en ai cité dans le cadre de la discussion générale. Prenez le vichy. C’est une toile de coton dont vous trouverez le nom générique dans le dictionnaire. Il en est de même pour le sèvres, une porcelaine ; le laguiole, un couteau ; le chantilly, une dentelle au fuseau. Il y a donc des dénominations qui sont devenues génériques, c’est-à-dire des noms communs. Aussi faut-il être vigilant, car si l’on ne prend pas en compte ces cas particuliers, on risque de créer des problèmes juridiques.

Monsieur le rapporteur, vous avez fait adopter en commission un amendement qui me paraît extrêmement dangereux : on serait désormais obligé de consulter les autorités municipales pour utiliser le nom d’une ville. Cela va poser problème. Pour illustrer mon propos, je prendrai l’exemple du couteau, produit que je connais bien. Une multitude de couteaux régionaux portent déjà des noms de ville alors qu’ils sont fabriqués uniquement par les artisans de Thiers. Je citerai d’abord le saint-amant, ayant été maire du petit village de Saint-Amant-Roche-Savine pendant vingt-sept ans. Désormais, faudra-t-il que les très nombreux couteliers thiernois qui fabriquent ce couteau demandent au maire de Saint-Amand-les-Eaux, mon camarade Alain Bocquet, une autorisation ? Je prendrai également le cas du montpellier, très beau couteau utilisé par les marins du sud et fabriqué également à Thiers. Faudra-t-il, là encore, demander une autorisation au maire de Montpellier ? Je citerai encore le roquefort qui, outre un fromage, est aussi un couteau fabriqué par plusieurs artisans thiernois. L’aurillac, qui a été créé et fabriqué à Thiers mais commercialisé à Aurillac, devra-t-il lui aussi être soumis à autorisation ? Je pourrais encore citer le sauveterre, le langres, l’issoire, l’yssingeaux – vous voyez les couteliers de Thiers aller à Yssingeaux demander, tels les bourgeois de Calais, l’autorisation de continuer à fabriquer ce couteau ? – le rumilly, le châtellerault, ou encore des noms de couteaux qui se rapportent à des départements ou des régions.

Monsieur le rapporteur, je le répète, faisons attention à ne pas surcharger notre législation au risque de créer des problèmes insurmontables, d’autant que la législation actuelle permet déjà de nombreux contrôles. En effet, si le nom d’une ville est utilisé abusivement, une sanction peut être appliquée.

Mme Laure de La Raudière. Merci, monsieur Chassaigne, pour cette leçon sur la fabrication des couteaux ! (Sourires.)

M. Éric Berdoati. De la coutellerie Chassaigne !

Mme Valérie Boyer. J’aurais pu faire la même chose pour le savon de Marseille, mais je n’ai pas voulu être trop longue !

M. le président. Monsieur Chassaigne, nous avons été sensibles à ce vibrant plaidoyer, notamment pour la coutellerie du Puy-de-Dôme.

Nous en venons aux amendements à l’article 7.

Je vous redonne la parole pour défendre l’amendement n° 136.

M. André Chassaigne. L’alinéa 3 de l’article 7 définit l’indication géographique comme la dénomination d’une région ou d’un lieu déterminé servant à désigner un produit manufacturé. Il faut veiller à ce que cette indication n’empêche pas de reprendre une dénomination devenue nom commun. Il faut éviter d’ouvrir la boîte de Pandore et de créer des problèmes là où il n’y en a pas.

M. le président. Monsieur Chassaigne, je vous propose de présenter également les amendements nos 137, 138, 139 et 140, qui traitent du même sujet.

M. André Chassaigne. Les amendements nos 137 et 138 portent sur l’alinéa 3 et les amendements nos 139 et 140 sur l’alinéa 5.

Dans la définition des critères permettant d’obtenir l’indication géographique figure le mot « transformation ». Cela voudrait dire qu’un produit manufacturé pourrait obtenir l’appellation s’il était seulement transformé dans ce lieu. Je comprends que certaines fabrications puissent subir une réelle transformation, mais pour prendre l’exemple des produits textiles, le simple ajout d’un petit signe animal suffirait à en conclure qu’il s’agit d’une production locale, sachant que le vêtement aurait été totalement fabriqué dans d’autres pays, notamment en Asie.

Encore beaucoup plus grave, l’alinéa 3 introduit la notion d’assemblage. Cela signifie qu’il suffirait d’assembler les composants nécessaires à la fabrication d’un produit manufacturé dans la ville qui lui donne son nom alors que ces composants auraient été fabriqués ailleurs, voire à l’étranger. On pourrait citer à nouveau l’exemple de la ville de Thiers pour les couteaux, même si certains produits ne peuvent être fabriqués que dans la région thiernoise, comme le tire-bouchon.

Si l’on maintient le mot « assemblage » dans le texte, c’est la porte ouverte à une interprétation qui ferait perdre toute sa valeur à l’article 7. En voulant bien faire, on porterait un rude coup à la production locale.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 136 à 140 ?

M. Daniel Fasquelle, rapporteur. Je vous remercie, monsieur Chassaigne, pour votre intervention sur un sujet qui vous passionne et qui passionne aussi les députés ici présents, car nous avons tous – et c’est la richesse de la France –, dans nos régions, des professionnels, des artisans qui maîtrisent leur art et que nous souhaitons défendre. Si vous m’y autorisez, j’ajouterais, au couteau de Thiers la dentelle de Calais.

L’amendement n° 136 n’a pas été examiné par la commission mais j’émettrai un avis défavorable dans la mesure où il risquerait de réduire la portée du dispositif souhaité par le Gouvernement. M. Chassaigne cite dans son exposé sommaire le cas du camembert, mais on ne peut pas fabriquer ce très beau produit ailleurs qu’en Normandie.

M. Jean Gaubert. On en fabrique en Bretagne !

M. Daniel Fasquelle, rapporteur. Alors, ce produit ne peut recevoir l’appellation « camembert ».

MM. Jean Gaubert et André Chassaigne. Si !

M. Daniel Fasquelle, rapporteur. Je donne ensuite un avis défavorable à l’amendement n° 137, qui n’a pas non plus été examiné par la commission. L’article 7, en instaurant l’indication géographique des produits non alimentaires, s’inspire de la réglementation européenne en vigueur relative aux produits alimentaires. Le règlement 510-2006 du Conseil précise que l’appellation d’origine désigne un produit dont la production, la transformation et l’élaboration ont lieu dans l’aire géographique délimitée, et que l’indication géographique concerne des produits dont la production et/ou la transformation et/ou l’élaboration ont lieu dans l’aire géographique délimitée. La transformation fait donc partie du processus dont la reconnaissance peut donner lieu à l’octroi d’une appellation particulière.

Sur l’amendement n° 138, la commission a émis un avis favorable. Il est vrai, je m’accorde avec vous, que l’assemblage ne nécessite pas un savoir-faire particulier, et que si les composants sont fabriqués n’importe où sur le territoire, voire à l’étranger, le système de protection est alors dépourvu de sens.

La commission n’a pas examiné l’amendement n° 139 mais j’émets un avis défavorable pour les mêmes raisons que pour l’amendement n° 137.

L’amendement n° 140 recueille, pour sa part, un avis favorable, pour les mêmes motifs que ceux avancés en faveur de l’amendement n° 138.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Ce dispositif entend pour une bonne part établir un parallèle avec celui concernant l’appellation d’origine contrôlée. Il convient de veiller scrupuleusement à conserver ce parallélisme des formes : si, demain, on allège les dispositions relatives aux IGP, on risque de nous expliquer qu’il faudra alléger de même les dispositions relatives aux AOC. Il faut maintenir l’ensemble des dispositions qui protègent l’IGP pour garantir l’ensemble des dispositions qui protègent l’AOC. Et je sais notre collègue Chassaigne très attaché aux appellations d’origine contrôlée.

Ne nous écartons pas de ce parallélisme des formes, faute de quoi nous risquons de fragiliser les appellations d’origine contrôlée, qui ne figurent pas dans le texte.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. J’avoue que la démarche de M. Chassaigne me laisse perplexe. Nous sommes certes solidaires et décelons bien les enjeux industriels et artisanaux dont il est question. Mais on voit bien l’extension à laquelle on peut procéder – M. Brottes vient de le montrer – à partir d’un concept concernant les denrées alimentaires.

Quand André Chassaigne évoque le pruneau d’Agen en tant qu’IGP, il renvoie à un mode de production unique en son genre combinant une terre et un climat. Le cas du savon de Marseille pour lequel plaide Valérie Boyer est, lui, plus compliqué.

Mme Valérie Boyer. Le savon de Marseille est le produit d’une recette.

M. Jean Dionis du Séjour. Le processus de fabrication est industriel. Même en tenant compte du génie marseillais, ce processus, par définition, est détaché du terroir, du territoire de Marseille.

Voilà qui ouvre un débat sur le lien objectif, scientifique, entre l’IGP agroalimentaire et le couple territoire-climat, lien qui fait défaut en matière industrielle. Il va donc falloir se montrer plus rigoureux dans la définition de l’IGP.

Tous les problèmes soulevés par M. Chassaigne concernent cette question : Laguiole, Thiers…

M. François Brottes. Il est vrai qu’on n’imagine pas un savon d’Agen… (Sourires.)

M. Jean Dionis du Séjour. En effet. J’observe juste que le lien objectif entre le savon de Marseille et le sol et le climat de Marseille apparaît moins nettement que dans le cas du pruneau d’Agen.

Pour finir, je rejoins les craintes que vient d’exprimer François Brottes.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Il est vrai que le cas du savon de Marseille est très compliqué. L’appellation « savon de Marseille » est liée, d’une part, à la recette du savon, qui doit être composé de 72 % d’huile et de produits que je vous ferai la charité de ne pas énumérer, et, d’autre part, au pentagone donné à Marseille par Colbert et reconnu en 1812 comme signe distinctif du savon de Marseille, événement dont nous allons célébrer le bicentenaire l’année prochaine.

Malheureusement, on trouve du savon dit « de Marseille » dans le monde entier, et qui contient des graisses animales, bref un produit dont la recette n’est pas celle du savon de Marseille, à savoir celle que désirent les consommateurs. Il y a donc tromperie dans l’utilisation du nom « savon de Marseille », du reste le seul détergent hypoallergénique. On achète du savon de Marseille parce qu’on lui attribue des qualités particulières. Il faut donc protéger les savoir-faire qui en permettent la fabrication.

En outre, la notion de terroir est bien valable puisque ce savon a été fabriqué à Marseille, qu’il fait partie de l’histoire économique et sociale de la ville. Nous devons donc trouver le moyen, j’y insiste, de protéger l’appellation et la recette de ce produit et le moyen de ne pas tromper le consommateur. Si le cas du savon de Marseille est plus complexe que celui d’autres produits précédemment évoqués, on n’en retrouve pas moins des points communs.

On doit pouvoir fabriquer du savon de Marseille en en respectant la recette dans une zone que le Gouvernement pourra définir par décret.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos 136 à 140 ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Avant de donner l’avis du Gouvernement, je tâcherai de répondre aux uns et aux autres.

Je remercie André Chassaigne pour le travail qu’il a accompli sur un sujet très important aux yeux du Gouvernement. Il faut savoir que l’IGP existe pour les produits alimentaires depuis 1992 – voilà qui devrait rassurer M. Brottes. L’IGP est une notion quelque peu différente de celle de l’AOC puisque, pour l’IGP, le lien entre le produit et le territoire est plus lâche, même si ce lien reste essentiel pour défendre les produits d’origine française – tel est l’enjeu aujourd’hui.

Mme Valérie Boyer. Exactement !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Le travail d’André Chassaigne est fructueux car, à l’instar de Jean Dionis du Séjour, il a recensé les difficultés d’organisation entre les acteurs en France. N’oublions pas l’objectif initial du dispositif : protéger nos savoir-faire artisanaux comme on protège déjà la qualité de nos produits alimentaires. Les artisans de toutes les régions de France réclament depuis de nombreuses années le droit de bénéficier du système en vigueur dans le secteur alimentaire.

Il s’agit de veiller à ce que la mondialisation ne fasse pas disparaître certains de nos savoir-faire, si importants et qui font, d’une certaine manière, l’âme de notre pays. Outre les exemples que vous avez cités, on pourrait aussi mentionner la dentelle du Puy. André Chassaigne n’ignore pas mes liens avec une région qu’il connaît bien…

Il va falloir examiner dans le détail toutes les questions concernant les rapports entre acteurs économiques et entre régions. André Chassaigne a parfaitement expliqué comment Thiers, à une époque, a repris la fabrication de certains types de couteaux – et pas seulement le laguiole…

M. André Chassaigne. Non seulement fabriqué mais aussi créé !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. En effet, mais certains couteaux auraient disparu si des artisans de Thiers n’en avaient pas repris la fabrication.

Comme l’a souligné Jean Dionis du Séjour, la prise en compte du lien géographique n’est pas le seul moyen de protéger un savoir-faire quand bien même, certes, il est lié à un territoire. C’est pourquoi l’alinéa 3 mentionne le cahier des charges prévu par l’article L. 115-2-1 du code de la consommation. Ce cahier des charges permettra de mettre d’accord l’ensemble des acteurs économiques sur le territoire national.

Mme Valérie Boyer. Exactement !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Il s’agit de relever avec eux les collaborations existantes et les lieux de production pour éviter – ainsi que le craint M. Chassaigne – que certaines activités, comme la fabrication du couteau, ne disparaissent et que certains acteurs ne perdent leur emploi.

Il faut donc que l’ensemble des acteurs se mettent d’accord sur un cahier des charges.

Ce cahier des charges est alors soumis au Gouvernement, et il est ensuite procédé à une enquête publique, parce qu’il se peut qu’un acteur économique n’ait pas été consulté ou considère que cela lui porte préjudice. Enfin, un décret est pris par le Gouvernement, qui homologue le produit artisanal ou les acteurs économiques concernés par cette IGP.

Vous le savez, monsieur Chassaigne, nous avons reçu ces acteurs économiques. Chacun a bien compris qu’il ne sera pas possible de voir disparaître une activité simplement parce qu’elle n’est pas située dans le lieu géographique précis qui porte le nom du produit artisanal en question.

On pourrait évidemment dire la même chose à propos du savon de Marseille, même si celui-ci est parfois fabriqué au-delà de nos frontières. Ce que nous voulons surtout empêcher, c’est que des produits artisanaux fabriqués à l’étranger, que ce soit en Europe ou en dehors, viennent inonder le marché français sans respecter les savoir-faire de nos régions, sans respecter l’authenticité des produits, et fragilisent ainsi aussi bien l’histoire de nos produits artisanaux que les territoires eux-mêmes et les entreprises qui y sont implantées.

Mme Valérie Boyer. Et qu’ils trompent le consommateur !

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Comme le rapporteur, je suis favorable aux amendements nos 138 et 140 d’André Chassaigne, qui a notamment évoqué la question très importante de l’assemblage. C’est un vrai problème, qu’il a eu raison de soulever.

De surcroît, il faut que chacun soit rassuré quant à la volonté du Gouvernement de bien respecter l’impératif que je viens de rappeler à l’instant : il n’est pas question qu’une procédure IGP vienne brutalement fragiliser des acteurs économiques sans que ceux-ci aient été consultés. La procédure, incluant une enquête publique, protégera contre un tel risque.

Il me semble donc que ce dispositif, utilement amendé par André Chassaigne, répondra à la demande qui s’exprime dans toutes les régions de notre pays : préserver l’origine France.

Je voudrais enfin souligner un point très important : sur cette question, nous avons obtenu l’accord de l’Europe.

M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez donc émis un avis favorable aux amendements nos 138 et 140. Et sur les trois autres amendements, nos 136, 137 et 139 ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Jean Dionis du Séjour.

M. Jean Dionis du Séjour. Je reviens à l’exemple du savon de Marseille. Notre collègue Valérie Boyer nous dit qu’il se définit d’abord par sa composition : 72 % d’huile. Cela, nous pouvons l’entendre. Là, nous voyons bien ce que nous pouvons protéger.

Mme Valérie Boyer. La recette.

M. Jean Dionis du Séjour. Oui, la recette. C’est un élément très clair. Il y a une marque « savon de Marseille », qui correspond à une certaine recette. Ça marche. On sait faire au niveau industrie.

Ce qui est plus compliqué et plus contestable, c’est de prévoir, comme le fait l’article 7, que « le cahier des charges indique le nom du produit, délimite l’aire géographique ». Vous ne vous en sortirez pas. Un produit peut fort bien être fabriqué à Singapour selon la recette du savon de Marseille. On peut protéger la marque « savon de Marseille », mais on ne peut pas dire que le savon de Marseille doit être exclusivement fabriqué, de manière optimale, dans une certaine aire géographique autour de Marseille. Ça ne marche pas. Ce qui est faisable pour le champagne ou le pruneau d’Agen ne l’est pas pour un produit industriel. Il y a là un problème.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Il faut distinguer deux choses s’agissant de ce produit, qui n’est pas vraiment industriel. Il reste quand même un produit assez artisanal. Nous avons encore quatre savonneries à Marseille, mais il y en a aussi aux alentours.

La première chose, c’est la protection du savoir-faire lié à la recette. Ensuite, on peut franchement se poser la question de l’appartenance du nom. Le nom de Marseille, ce n’est pas Bangkok, ce n’est pas Pékin, ce n’est pas Durban. Nous devons donc avoir une réflexion sur le nom qui est attaché à un savoir-faire. Si des « savons de Marseille » sont fabriqués partout dans le monde – peu importe la recette, d’ailleurs –, on trompe les consommateurs, qui attendent aussi une recette et des savoir-faire.

Il faut voir les choses en deux temps. D’abord, protéger la recette. Ensuite, mener une réflexion sur l’appartenance du nom. Parce que le nom, il appartient aussi à notre ville et à notre région. Et c’est parce qu’il y a ce nom que le produit est vendu.

Le premier aspect est essentiel, s’agissant de ce produit traditionnel, ou semi-industriel. Mais le nom de la ville est aussi un élément très fort, qui permet de vendre ce produit. La réflexion doit porter sur ces deux aspects.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. Toutes les IGP sont des marques. Toutes les marques ne sont pas des IGP. Je pense que c’est comme cela qu’il faut aborder le problème.

Si le savon de Marseille s’appelait, mettons, le « savon de Valérie », il n’y aurait pas de localisation. Ce serait une marque simple, et il s’agirait de garantir la recette. Mais il y a une usurpation dans le fait d’utiliser un nom géographique, avec toutes les connotations qui peuvent lui être attachées – le soleil, le bien-être –, pour désigner un produit qui n’a rien à voir avec le territoire en question. Cette usurpation n’est pas convenable. C’est d’ailleurs pour cela que le texte précise un peu plus loin que les collectivités territoriales sont « consultées préalablement à l’utilisation de leur nom ».

Encore une fois, si le savon dont nous parlons s’appelait « savon de Valérie » – sa fabrication respectant la recette –, cela ne poserait aucun problème. Ce serait une marque, comme n’importe quelle autre marque. Par contre, quand on utilise le nom de Marseille pour désigner quelque chose qui n’est pas une IGP mais une marque, c’est une usurpation. Il y a là un problème que nous devons repérer. Parce que, sinon, nous allons nous faire brigander de tous les côtés, dans tous les domaines.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Je voudrais revenir très rapidement à l’amendement n° 136. Son objectif était tout simplement d’éviter des procédures judiciaires. Car elles vont se multiplier. Nous n’avons pas de problème particulier pour le couteau laguiole. L’affaire a déjà été jugée en appel. J’ai sous les yeux le jugement de la Cour d’appel de Paris, en date du 3 novembre 1999. Je ne vous en lis que trois extraits, qui permettront de comprendre que le problème que j’ai soulevé pour le laguiole va se reposer partout – cela fera travailler les avocats.

« Mais considérant que le nom de lieu de Laguiole, appliqué à un certain type de couteaux, ne sert plus à désigner un lieu mais davantage un produit apprécié du public, qui l’a communément adopté ;

« Qu’il n’est pas démontré que le public soit porté à croire que les couteaux présentant la forme spécifique des couteaux Laguiole proviennent indubitablement de la commune de Laguiole et non pas d’un autre lieu géographique situé en France ;

« Considérant que la société X réplique pertinemment, en produisant une nombreuse documentation versée aux débats, que le terme « laguiole » est devenu usuel et générique pour désigner un certain type de couteaux et qu’il ne fait pas nécessairement référence à la commune de Laguiole et aux communes avoisinantes dans lesquelles sont fabriqués les couteaux à l’aspect particulier, aisément reconnaissable »…

L’objet de cet amendement n° 136, donc, était d’éviter que ne se déclenchent toute une série de procédures judicaires.

Cela dit, j’ai bien pris acte des propos de M. le secrétaire d’État, qui a rappelé que l’article prévoit un cahier des charges et qu’il y aura une enquête publique. Je pense que celle-ci règlera ce type de problème. En tenant compte, monsieur le secrétaire d’État, de l’esprit de dialogue qui a été le vôtre et de cette construction collective à laquelle nous sommes en train de travailler, je veux bien retirer l’amendement n° 136. La réflexion avancera d’ici à la seconde lecture.

De la même façon, je suis disposé à retirer les deux autres amendements, nos 137 et 139, qui n’ont pas reçu un avis favorable du rapporteur et du secrétaire d’État, dans la mesure où une vraie concertation est menée avec les entreprises et les élus des territoires, et où cette approche demande une réflexion approfondie.

Je maintiens uniquement les deux amendements qui ont reçu un avis favorable du secrétaire d’État et du rapporteur. J’en profite d’ailleurs pour les remercier d’avoir pris en compte les réflexions que j’ai essayé de développer.

(Les amendements nos 136, 137 et 139 sont retirés.)

(L’amendement n° 138 est adopté.)

(L’amendement n° 140 est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d’un amendement n° 141.

La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. J’ai déjà défendu cet amendement de suppression des alinéas 15 et 16. Il est inutile d’ajouter de nouvelles explications.

M. le président. La parole est à M. Éric Berdoati.

M. Éric Berdoati. Nous étions un certain nombre – nous étions presque unanimes, à la vérité – à partager la démonstration de notre collègue André Chassaigne sur les noms génériques. Cet amendement, par contre, peut poser un problème pour des communes dont le nom, pour des raisons historiques ou symboliques, a ou pourrait avoir une valeur commerciale pour des tiers.

Il se trouve que je suis maire d’une commune, Saint-Cloud, dont l’histoire permet parfois à certaines entreprises privées de mieux vendre leurs produits. J’ai été confronté, à plusieurs reprises, à des entreprises qui utilisaient le nom de la commune en l’accolant à une manifestation qu’elles organisaient, sans nous consulter et à des fins commerciales. On est assez loin, j’en conviens, de la question des produits du terroir, mais je pense qu’il ne faut pas supprimer un dispositif qui permet d’agir pour la défense même du nom de sa commune. Le problème s’est encore récemment posé pour la commune de Versailles. Il se pose aussi à d’autres communes qui ont une vocation historique. Je me demande si l’amendement n° 233 ne serait pas susceptible d’apporter une réponse à ce problème.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission des affaires économiques.

M. Serge Poignant, président de la commission des affaires économiques. Ce que vient de dire Eric Berdoati est très juste. Cette question, vous l’avez rappelé, monsieur Chassaigne, a été abordée en commission. Vous aviez dit, monsieur le secrétaire d’État, que vous reconnaissiez qu’il y avait un problème, mais qu’il fallait peut-être réfléchir à une rédaction qui fasse référence à l’Institut national de la propriété industrielle et qui aborde également la question de l’information des communes. C’est ce que nous avons tenté de faire, avec mes collègues Christian Jacob et Daniel Fasquelle, en déposant l’amendement n° 233.

Le propriétaire d’une marque doit pouvoir se protéger en évitant que l’utilisation de son nom lui porte atteinte. Les collectivités territoriales doivent pouvoir en faire autant. C’est ce que nous proposons, dans le même article et avec les mêmes conditions. L’amendement précise également qu’il est possible de faire opposition à la demande d’enregistrement auprès du directeur de l’INPI. Il indique, d’autre part, qu’un décret fixe les conditions dans lesquelles les collectivités territoriales doivent être informées de l’utilisation de leur nom.

Je crois, monsieur Chassaigne, que l’adoption de cet amendement serait une bonne chose, et que vous pourriez, sous ce bénéfice, retirer le vôtre. Si vous ne le retiriez pas, je souhaiterais évidemment qu’il ne soit pas adopté, car cela ferait tomber l’amendement n° 233.

M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 233, que nous allons examiner en même temps que l’amendement n° 141.

Quel est l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d’État. Nous avons, en commission, longuement débattu de ce sujet, qui n’est pas simple. Il y a des arguments parfaitement légitimes des deux côtés. Il faut évidemment veiller, comme l’a dit M. Chassaigne, à ne pas fragiliser le développement d’une entreprise qui a su s’appuyer sur un savoir-faire local. Dans le même temps, il faut aussi qu’un maire puisse défendre l’honneur de sa commune si le nom de celle-ci était utilisé par une marque dans des conditions qui, pour une raison ou une autre, porteraient atteinte à l’honorabilité ou aux intérêts de cette commune.

Ce sujet est très complexe. J’ai fait part d’un certain nombre de réserves, ainsi que François Brottes et le rapporteur. Le président de la commission a souhaité que nous retravaillions ces questions, et nous avons abondamment échangé sur ce point.

Tel que l’amendement n° 233 est rédigé, il ouvre un droit d’opposition aux collectivités territoriales devant l’INPI si la marque porte atteinte au nom, à l’image ou à la renommée de la commune. Ce texte a beaucoup évolué, et il évite dorénavant nombre des risques inhérents à la rédaction qui avait été discutée en commission.

Compte tenu de cette évolution, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur l’amendement n° 233.

Quant à l’amendement n° 141, dans sa volonté de permettre à une marque existante de continuer à prospérer, il empêche une collectivité territoriale de protéger sa renommée, qui pourrait être mise en cause par une marque nouvelle. Avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. M. Poignant s’étant exprimé à titre personnel pour défendre son amendement, je vais maintenant demander l’avis de la commission.

M. Daniel Fasquelle, rapporteur. La commission a débattu de cet amendement qui a connu une évolution heureuse depuis le mois de juillet.

Je donne un avis défavorable à l’amendement n° 141, afin de permettre l’adoption de l’amendement n° 233 qui a été présenté par Serge Poignant, et auquel tenait beaucoup Christian Jacob.

Maire de la commune du Touquet Paris-Plage, je suis également attaché à cet amendement à titre personnel, car le nom de cette commune est très souvent utilisé. Je crois que ce dispositif s’appliquera également lorsqu’une collectivité souhaitera utiliser le nom d’une autre. Il est important que les communes puissent protéger leur nom, leur image et leur renommée, et il y a là une réelle avancée à laquelle les maires des communes touristiques seront sensibles. J’émets donc un avis très favorable à l’amendement n° 233.

M. le président. La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes. L’amendement n° 233 améliore en effet la rédaction, mais une question m’inquiète : il ne faudrait pas que les commerces installés dans les villes soient concernés par la mise en œuvre de cet amendement.

Ainsi, le magasin de fleurs cher au maire du Touquet, qui pourrait s’appeler « Aux fleurs du Touquet » ne devrait pas avoir de démarche à faire, car il est installé sur le territoire de la commune. Afin de préciser ce point, peut-être faudrait-il ajouter dans le texte de l’amendement, après les mots « à des fins commerciales », les mots « en dehors de la commune concernée »,.

Les commerçants d’une ville qui en utilisent le nom dans leur enseigne ne devraient pas être obligés de se soumettre à la procédure de cet amendement ; ce serait extrêmement lourd, et je pense que ce n’est la volonté d’aucun d’entre nous.

M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.

M. André Chassaigne. Nous sommes sur un terrain où nos décisions peuvent avoir des conséquences sérieuses. Le même problème a été discuté à l’occasion de lois précédentes. Une décision du Conseil constitutionnel a censuré l’article L. 45 du code des postes et communications téléphoniques parce qu’il portait atteinte au droit de disposer librement d’un nom.

À compter du 1er juillet 2011, les communes ne vont plus bénéficier de l’usage exclusif de leur nom géographique, et un demandeur pourra l’utiliser s’il justifie d’un intérêt légitime et s’il agit de bonne foi. C’est dans la loi. Le Journal des maires de France nous précise que l’Association française pour le nommage internet en coopération, qui gère les noms de domaine pour la France, a déjà répondu favorablement à la demande de l’AMF de maintenir la protection a priori qui existait déjà pour les collectivités à partir de la liste officielle tenue à jour par l’INSEE. Il appartiendra donc au demandeur de se justifier au moment du dépôt de sa demande, et les éléments permettant d’établir un usage de mauvaise foi et l’absence d’intérêt légitime seront définis dans un futur décret.

Une décision a donc déjà été prise, un décret est en préparation, et nous allons ajouter une usine à gaz avec cet amendement n° 233, présenté par le rapporteur et le président Poignant, alors que rien ne figurait dans le texte initial.

Pour ma part, je maintiens l’amendement de suppression pour revenir au texte du Gouvernement, et bien évidemment, en aucun cas je ne voterai l’amendement n° 233. Il est extrêmement dangereux, et c’est le signe qu’en voulant bien faire, en accumulant les amendements et en cherchant une formulation qui plaise à tout le monde, on risque de voter une mesure à la légère alors qu’un décret est en préparation sur le même sujet.

M. le président. La parole est à M. le président de la commission.

M. Serge Poignant, président de la commission des affaires économiques. En tant que cosignataire de l’amendement, je ne suis pas du tout d’accord avec la vision d’André Chassaigne.

Je souhaite également rassurer François Brottes : il ne s’agit pas de créer une procédure obligatoire, mais simplement de donner une possibilité d’agir à la collectivité en lui reconnaissant un droit d’opposition.

M. le président. La parole est à M. Éric Berdoati.

M. Éric Berdoati. J’ai bien écouté la démonstration très argumentée d’André Chassaigne, et si j’ai compris son propos, notamment concernant le décret en attente, le dispositif qu’il souhaite voir instaurer serait annihilé par son amendement n° 141. Il devrait au contraire se rallier à notre position.

(L’amendement n° 141 n’est pas adopté.)

(L’amendement n° 233 est adopté.)

M. le président. En conséquence, l’amendement n° 142 tombe.

(L’article 7, amendé, est adopté.)

Clôture de la session extraordinaire

M. le président. M. le président de l’Assemblée nationale a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République, en date du 30 septembre 2011, portant clôture de la troisième session extraordinaire de 2010-2011.

En conséquence, il est pris acte de la clôture de cette session extraordinaire.

Pour en savoir plus : Intervention générale sur le texte

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