Je condamne avec la plus grande fermeté la décision de la Commission européenne de sanctionner plusieurs syndicats et organisations agricoles français, dont la FNSEA, pour entrave à la libre concurrence et au libre marché. Cette décision traduit un refus catégorique de la Commission d’organiser les marchés agricoles en Europe. Elle constitue un scandale à plusieurs titres.
Tout d’abord, elle ne prend pas en compte la situation dramatique des éleveurs bovins lors de la seconde crise de l’ESB fin 2000 début 2001. L’effondrement des prix de la viande bovine à cette époque imposait une intervention publique et syndicale. En l’absence de mécanismes européens de régulation des marchés, cette intervention était nécessaire pour assurer la survie économique de nombreux éleveurs de ce pays.
De plus, cette sanction est juridiquement infondée. En effet, l’effondrement des cours à la production n’avait pas eu d’incidence sur les prix à la consommation. Ce qui prouve que l’entrave aux règles de la concurrence était le fait des seuls intermédiaires de la filière bovine. L’intervention du ministère de l’agriculture et de syndicats agricoles n’a donc pas affecté le fonctionnement d’un marché libre : elle a simplement porté atteinte au comportement spéculatif des intermédiaires de la filière bovine.
Cette décision marque aussi la volonté de la Commission de Bruxelles de passer en force sur le dossier de la réforme de la PAC. En condamnant la FNSEA, la Commission souhaite simplement abattre une des principales organisations syndicales européennes. A l’heure où s’organise la résistance contre le démantèlement de la PAC et contre la soumission de l’agriculture européenne aux projets ultralibéraux portés par l’OMC et le groupe de Cairns. Les autres syndicats agricoles français (Confédération paysanne, MODEF, Coordination rurale…) ne s’y sont d’ailleurs pas trompés ; je me félicite qu’il aient tous critiqué fermement la décision de Bruxelles et exprimé leur solidarité à l’égard des organisations condamnées.
Enfin cette décision constitue une attaque sans précédent des institutions européennes à l’égard du mouvement syndical. La Commission européenne a décidé de porter un coup fatal à une organisation qui s’est simplement contentée de remplir son rôle de syndicat. Elle constitue ainsi un dangereux précédent. Si la Commission devait condamner toutes les organisations collectives dont l’action a une incidence sur le fonctionnement des marchés, ce sont tous les syndicats européens qui pourraient être concernés par cette stratégie répressive. A quand la condamnation d’un syndicat de salariés qui pousserait un employeur à signer une convention collective ? En effet, tout accord collectif conduit de fait à entraver le libre fonctionnement du « marché du travail ».
Je ne peux donc qu’exprimer un vigoureux sentiment de révolte à l’égard d’une décision liberticide illustrant la soumission de la commission de Bruxelles au capitalisme financier. J’exprime aussi tout mon soutien aux dirigeants syndicaux incriminés par cette décision de Bruxelles, comme je l’ai fait lundi 7 avril dans mon département en manifestant à l’appel de la FNSEA.